La Sacem soutient-elle réellement les licences libres ?
Suite à son accord signé avec Creative Commons début 2012, la Sacem vient de communiquer, selon ses dires, "Un premier bilan satisfaisant" de cette expérimentation (Voir le communiqué officiel de la Sacem : www.sacem.fr/cms/home/la-sacem/derniers-communiques-2013/sacem-et-creative-commons-renouvellent-leur-accord-septembre2013 ).
Cependant, l'observation des chiffres annoncés laisse entrevoir un tout autre constat, tant le bilan est décevant. La Sacem indique dans son communiqué de presse qu'en 18 mois, "713 œuvres ont été placées sous licences Creative Commons par 60 auteurs compositeurs (...) membres de la Sacem".
En d'autres termes, il y aurait eu moins d'oeuvres publiées sous ces licences par la Sacem en 18 mois qu'en une semaine sur Jamendo...
La Sacem avait pourtant été alertée par la communauté et notamment par Jamendo, premier service de musique sous licences Creative Commons, que les conditions mises en place par la Sacem encadrant l'utilisation des licences Creative Commons étaient bien trop restrictives pour ses membres.
En effet, seules les trois licences Creative Commons les plus restrictives ont été retenues par la Sacem, et ce choix ne permet pas aux artistes de promouvoir leur musique via les plateformes de diffusion les plus populaires, ayant souvent un but commercial. Pourtant Jean-Noël Tronc, Directeur général de la Sacem, précise dans le communiqué que "l'objectif est toujours le même: laisser à nos membres (...) le choix le plus large concernant les modalités de protection de leurs créations"; alors que dans les faits, la Sacem semble vouloir agir au mieux pour conserver son monopole sur la gestion des droits d'auteur, voire potentiellement décrédibiliser les licences libres.
Passer outre le succès des licences Creative Commons en se focalisant sur un bilan mitigé ne permet pas de se faire une réelle idée du potentiel de ces licences dans la musique.
Sur Jamendo, 30 000 artistes ont choisi de publier 400 000 oeuvres sous ces licences et plusieurs centaines y sont publiées chaque jour. Grâce au modèle économique basé sur le licensing, Jamendo génère chaque mois des revenus pour plusieurs milliers d'artistes et séduit un nombre de plus en plus important de clients à travers le monde.
Il est tout aussi étonnant de relever que, malgré le bilan décevant du projet pilote avec Creative Commons, la Sacem n'a pas manifesté de volonté de se rapprocher des plateformes de diffusion commerciales, alors que Jamendo a déjà signé des accords pour ses artistes avec des sociétés de gestion collective étrangères comme ASCAP et BMI aux États-Unis ou la TEOSTO en Finlande. Jamendo soutient également le projet C3S, société de gestion alternative et adaptée aux nouveaux usages numériques.
Les artistes voient dans les licences Creative Commons une opportunité de faire découvrir leur musique, de trouver leur public, et de financer leur passion. Les licences libres constituent à ce titre un formidable outil de partage de la connaissance et de l'art.
Jamendo est convaincu qu'au delà de permettre la gestion libre de la musique par les artistes, les Creative Commons apportent le dynamisme vital au marché de la musique qui souffre de l'inertie de ses acteurs historiques.