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Investissement des Business Angels dans le secteur internet

Baisse du montant total investi, forte baisse du nombre de levées de fonds


FIBAMY - 2nd Semestre 2014

Montant total investi

Montant total investi

Nombre total de levées de fonds

Nombre total de levées de fonds

Principales observations

Après un premier semestre décevant, le second semestre 2014 révèle une nouvelle dégradation de l'activité des Business Angels dans le secteur internet :

  • Comparé au second semestre 2013, les baisses observées sur le second semestre 2014 du montant total levé et du nombre de levées de fonds sont respectivement de 24% et 29% ;
  • Comparée à l'année 2013, l'année 2014 affiche une baisse de 13% du montant total levé et de 25% du nombre de levées de fond.

Le seul élément positif à noter est l'augmentation de la taille moyenne des tours de table qui s'approche de 400 K€ contre moins de 350 K€ les années précédentes.

La saisonnalité observée sur les troisième et quatrième trimestres est surprenante avec un très faible troisième trimestre et un quatrième trimestre plus fort.

Alors que la France accuse toujours un retard très important en matière de financement des start-ups du numérique par les Business Angels (à PIB égal, environ 25 fois moins que les Etats-Unis et 10 fois moins que le Royaume Uni) et que les start-ups du numérique se portent bien (cf Baromètre FranceDigitale 2014), cette dégradation du FIBAMY qui ramène le nombre de levées de fonds au niveau de 2011 est inquiétante et potentiellement révélatrice d'une stagnation du secteur et d'un trop faible renouvellement de l'écosystème.

Cette situation préoccupante peut trouver une partie de son explication parmi les éléments de contexte suivants :

  1. Le contexte général de croissance anémique et le faible niveau de confiance général des décideurs économiques conduit naturellement les investisseurs individuels à être prudents et les jeunes start-ups dépendantes de l'économie traditionnelle à connaître des difficultés de démarrage ;
  2. Malgré un discours gouvernemental très favorable aux start-ups, l'année 2014 a pu donner au travers du décret Montebourg/Asltom, des articles 11 & 12 de la loi Hamon, des lois concernant le quota de stagiaires ou la limitation des temps partiels, de la loi Thévenoud sur les VTC… un sentiment d'instabilité et d'incohérence bien évidemment très peu favorable à l'investissement ;
  3. Le FIBAMY étant fondé sur un " tracking " des levées de fonds annoncées et reprises par la presse, il est possible que certains tours de table ne soient peut-être pas rendus publics. C'est le cas de la plupart des refinancements par des Business Angels (déjà actionnaires d'une start-up), ce qui indiquerait que ceux-ci se voient contraints, de se concentrer sur leur portefeuille plutôt que d'investir dans de nouvelles start-ups, faute de pouvoir attirer de nouveaux investisseurs à leurs côtés.

Une analyse plus détaillée de l'activité durant l'année 2014 montre également que :

  1. Les réseaux de Business Angels sont en train de quitter le secteur internet. Leur activité est en baisse très nette de 58% (en nombre de tours de table). Ce sont donc les " serial Business Angels " (dont surtout les entrepreneurs de l'internet) qui évitent une dégradation dramatique du nombre de levées de fonds. Il est très probable que les réseaux généralistes de Business Angels éprouvent des difficultés à évaluer de nombreux projets internet faute de l'expertise nécessaire dans les sous-secteurs concernés.
  2. Les tours de table d'amorçage menés par des investisseurs professionnels (donc non comptabilisés dans le FIBAMY) sont quant à eux très stables en valeur et en nombre. Ils correspondent notamment au déploiement en 2012/2013 par Bpifrance du FNA (Fonds National d'Amorçage). On notera qu'il n'est pas rare de voir des Business Angels participer aux tours de table menés par de tels fonds d'amorçage, ce qui peut expliquer partiellement la baisse du nombre de tours de table où les Business Angels sont leaders des opérations de financement.
  3. Le financement participatif de type " equity crowdfunding ", apparu en 2013, reste modeste (impliqué dans moins de 10% des opérations), ce qui est logique dans la mesure où les décrets d'application réglementant ce nouveau type de financement n'ont été disponibles qu'en fin d'année 2014. A noter cependant que la taille moyenne des tours de table impliquant un tel financement a fortement progressé à presque 400 K€ et que les plateformes ne communiquent peut-être pas de façon systématique sur les levées de fonds plus modestes (ce qui ne permettrait donc pas de les comptabiliser dans le FIBAMY).

En conclusion, le FIBAMY de ce second semestre 2014 confirme une baisse significative de l'activité des Business Angels dans le secteur internet et confirme également une concentration forte de la communauté d'investisseurs autour des serial Business Angels (notamment les entrepreneurs du web) et des investisseurs professionnels (fonds FNA par exemple).

Cette concentration est sans doute synonyme d'une certaine forme de rationalisation et d'efficacité de cet étage de la chaîne de financement. Le recul observé est cependant préoccupant quant à la croissance et au renouvellement de l'écosystème internet français.

" Un écosystème de start-ups c'est comme un tas de sable…
…Pour que la pointe soit haute, il faut que sa base soit large
"

Méthodologie

Dans le cadre de la gestion de son fonds dédié au " post-amorçage " dans le secteur internet, ISAI traque l'ensemble des levées de fonds " early stage " du secteur internet annoncées par les média faisant référence (Frenchweb, Journal du Net, CFNews, FusacqBuzz, Maddyness). Cette veille lui permet à la fois de vérifier sa couverture du secteur et d'identifier de nouvelles opportunités d'investissement.

Les éléments chiffrés reprennent ainsi depuis début 2011, l'ensemble des tours de table dont les " leaders " sont des Business Angels (personnes physiques ou holdings) et dont le montant levé est révélé et est inférieur à 1 Million d'euros.

Le FIBAMY (French Internet Business Angel Money Yardstick) a ainsi été créé suite au PLF2013 et au mouvement des Pigeons pour obtenir un indicateur objectif de l'activité Business Angel dans le secteur internet en France.

Rappel

Le secteur internet et du numérique en général présente des particularités par rapport au reste de l'économie. Il est, par nature, extrêmement fragmenté et voit la création de milliers de startups chaque année. Ces petites entreprises connaissent un financement en fonds propres progressif correspondant à des tours de table successifs dont les montants augmentent au fur et à mesure que les sociétés arrivent à révéler le potentiel de création de valeur associé à leur activité.

Avant de pouvoir, le cas échéant, mobiliser des fonds de capital-risque et d'envisager des tours de table de taille supérieure, les start-ups lèvent de l'argent auprès d'investisseurs dits providentiels : les Business Angels. Ces investisseurs sont soit des personnes physiques investissant en direct dans l'entreprise, soit des sociétés holdings individuelles ou collectives mises en place par des personnes physiques pour réaliser ce type d'investissement, soit une combinaison des deux.

L'activité des Business Angels a fortement progressé de 2008 à 2012 en France, notamment dans le secteur internet, sous l'effet de deux phénomènes :

  • De nombreux entrepreneurs du secteur ont décidé de ré-investir une partie de leur patrimoine dans ce secteur qu'ils connaissent bien et qui est porteur de très nombreuses opportunités ;
  • Encouragés par le dispositif ISF-PME, de nombreux contribuables assujettis ont goûté aux vertus de cette activité et ont trouvé dans le numérique un secteur dans lequel ils ont trouvé des opportunités pas trop difficiles à appréhender.

On rappelle, qu'à PIB égal, l'activité Business Angel en France est 25 fois moins développée qu'aux Etats-Unis où elle constitue une force de financement équivalente ou supérieure à celle du capital-risque. La vivacité de cette activité aux Etats-Unis est majoritairement due à l'émergence d'une forte population d'entrepreneurs et de salariés ayant participé à des succès dans le secteur et ayant décidé d'y ré-investir massivement. Les tours de table menés par des Business Angels aux Etats-Unis sont beaucoup plus nombreux et portent souvent sur des montants investis beaucoup plus importants.

Publié le 9 février 2015 par Emmanuel Forsans
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