10 ans de rétrospective de l'app économie depuis le lancement de l'Iphone
La relation symbiotique entre les développeurs d'applications et les plateformes
Préface
Il est aisé d'oublier les étapes d'un voyage une fois arrivé à destination. Les circonstances ayant rendu ce voyage possible et les obstacles rencontrés sur le chemin disparaissent souvent des esprits . L'histoire de l'économie des applications ne déroge pas à la règle. En près d'une décennie d'existence, porté par la montée en puissance des smartphones, l'écosystème des applications a connu une croissance exponentielle. Evalué à 810 milliards d'euros[1], l'économie des applications est conduite par les développeurs et innovateurs associés à des plateformes comme l'App Store d'Apple qui leur ont permis d'atteindre les consommateurs du monde entier. En 2017, 3,4 milliards de personnes ont passé 1,6 milliards d'heures à utiliser des applications sur une variété de plateformes[2] et le poids économique des applications logicielles ne cesse de croître. Cette rétrospective révèle que la relation symbiotique qu'entretienne les développeurs d'applications et les plateformes stimule l'économie des applications.
I. Introduction
Les développeurs d'applications ont parcouru un long chemin depuis la création de l'IPhone. Au début des années 90, les consommateurs devaient d'abord trouver, puis se rendre dans les points de vente physiques qui commercialisaient des logiciels informatiques. Une fois la connectivité internet devenue la norme dans les résidences privées, les consommateurs ont pu télécharger des applications dans le confort de leur foyer sans devoir se déplacer dans les points de vente physiques. Pourtant, l'âge d'or du logiciel informatique n'est en rien comparable à la révolution des applications mobiles, au regard de sa taille et de son échelle, au cours de laquelle les développeurs de logiciels sont devenus développeurs d'applications. Aujourd'hui, le nombre de logiciels dans l'App Store d'Apple pour téléphone mobile et PC dépasse les 1,5 million[3].
Avant l'omniprésence des plateformes mobiles, l'écosystème des applications logicielles ne fonctionnait que sur des ordinateurs personnels. Les premières sociétés d'applications, composées de petites équipes, devaient porter plusieurs casquettes afin de développer, commercialiser et bénéficier de la vente de leurs produits. En plus d'un travail de programmation de leurs produits, les développeurs d'applications étaient responsables de :
- Gérer leurs sites web publics ;
- Embaucher une tierce-partie chargée de gérer leurs transactions financières ;
- Employer des équipes juridiques afin de protéger leur propriété intellectuelle ;
- Passer des contrats avec les distributeurs pour promouvoir et sécuriser la confiance des consommateurs dans leurs produits.
Les compétences requises pour gérer les frais généraux de la distribution de logiciels en ligne ne faisaient pas parties des "compétences de base" des petites entreprises de développement d'applications. Ces étapes supplémentaires étaient coûteuses en temps et en argent et ce, avec peu d'avantages tangibles pour les développeurs.
Dans l'économie de l'Internet, la confiance immédiate du consommateur est presque impossible sans une réputation en ligne substantielle et, ne pas l'atteindre signifie la fin de n'importe quelle société d'application. Mais que faut-il comprendre dans le mot "confiance" ? Dans ce contexte, la confiance se réfère à une relation établie entre l'entreprise de développement d'applications et le consommateur dans laquelle le consommateur témoigne de sa confiance en installant l'application et en divulguant certaines informations personnelles à cette entreprise d'applications. Avant l'avènement des plateformes, les développeurs de logiciels devaient souvent remettre leurs produits à des entreprises bénéficiant d'une bonne réputation afin de franchir l'étape de la "confiance".
Par exemple, Bungie, un développeur américain de jeux vidéo à succès (comme Halo, Myth, Oni et Marathon ), a fait état de la difficulté parfois oppressante des conditions de distribution qui étaient imposées aux développeurs de logiciels dans l'écosystème pré-plateformes en 1996. Bungie a pu constater que lorsqu'il traitait avec les détaillants, en plus de garantir un prix compétitif, il devait s'acquitter de près de 8 400 euros de frais de lancement, de frais de livraison de produit aux distributeurs, auxquels s'ajoutaient des frais de marketing de 3 à 6% des ventes ainsi que l'engagement de rachat des invendus[4]. Une fois les contrats négociés, les développeurs de logiciels devaient payer des frais supplémentaires pour que les catalogues des magasins affichent leurs produits et qu'ils soient placés sur des boxes promotionnelles à l'entrée des points de vente afin d'attirer l'oeil du client avant même qu'il ne puisse voir leurs produits en rayon[5].
Depuis l'avènement du smartphone, l'expérience décrite par Bungie n'est plus la norme. L'iPhone est venu révolutionner l'économie dans son ensemble et a permis l'établissement d'une relation symbiotique entre Apple et les développeurs d'applications sur sa plateforme, l'App Store. Dans la décennie écoulée depuis l'introduction de l'App Store, les développeurs et les sociétés d'applications ont contribué non seulement au succès global de l'iPhone mais également à l'amélioration de ses fonctionnalités et performances.
II. Etat des lieux avant l'entrée sur le marché de l'iPhone
Dès 2002, l'Internet haut débit a fait son entrée dans la vie quotidienne des consommateurs et ce, grâce au câble et à la connexion DSL qui fournissaient un accès internet à des vitesses plus élevées que l'accès à internet par ligne commutée[6]. Grâce à ces progrès technologiques, l'Internet a complètement transformé le marché et la façon dont les consommateurs reçoivent les biens et services, en particulier dans l'industrie musicale. Par exemple, les sociétés comme Napster ou LimeWire ont mis à disposition des consommateurs leurs services de partage de fichier pair à pair (peer-to-peer) pour que ces derniers puissent télécharger le plus récent morceau de musique de leur artiste préféré. Or, ces services étaient problématiques en ce qu'ils allaient à l'encontre de droits d'auteurs protégés[7]. De surcroît, les consommateurs couraient régulièrement le risque de télécharger un fichier contenant des logiciels malveillants. La société Apple a lancé iTunes qui offrait une alternative intéressante aux consommateurs, révolutionnant leur façon d'acheter de la musique. Les consommateurs pouvaient acheter n'importe quelle chanson dans le confort de leur maison sans enfreindre les droits d'auteur et sans se soucier des logiciels malveillants.[8]
Seulement deux ans plus tard, YouTube et Facebook ont fait leur apparition sur le marché et ont généré l'augmentation des demandes de services haut débit[9]. Cette demande du grand public a eu pour effet l'intégration des réseaux de communication haut débit à la vie quotidienne des consommateurs[10]. L'utilisation universelle des services haut débit par liaison filaire a également répondu à la demande d'accès continu et immédiat à internet du grand public tout en la stimulant. Cet accès nécessitait une puissance du réseau et un grand nombre de données qu'aucun appareil mobile ne pouvait fournir à cette époque.
Les consommateurs devaient posséder plusieurs appareils offrant des services différents. Les téléphones mobiles traditionnels étaient principalement utilisés pour effectuer des appels téléphoniques et envoyer des messages textes et ne fournissaient pas particulièrement de services Internet (tels que la consultation de courriels ou l'accès à des sites web)[11]. Les Assistants Numériques Personnels (Personal Digital Assistant (PDA)), tel que le Palm Pilot, servaient principalement de planificateurs de tâches ne donnant qu'un accès limité à l'Internet par lequel les utilisateurs pouvaient consulter leur courrier électronique ou surfer sur l'Internet. L'expérience des utilisateurs était loin de celle qu'ils vivent avec un smartphone contemporain[12]. De plus, pour écouter de la musique, les consommateurs utilisaient des lecteurs MP3 comme l'iPod. Au cours de sa journée, le consommateur devait ainsi osciller entre plusieurs appareils et accédait aux services de manière compartimentée.
En 2003, lors de sa première conférence "All Things Digital", Steve Jobs a présenté un appareil permettant de réunir toutes ces fonctionnalités[13]. Puis, le 7 septembre 2005, Apple s'est associé à Motorola pour lancer son téléphone mobile ROKR E1[14], appareil qui fusionnait les fonctionnalités d'un téléphone mobile traditionnel de l'époque et un lecteur intégré de musique, iTunes, avec une mémoire de 100 chansons et une capacité Bluetooth limitée[15].
Deux ans plus tard, le 9 janvier 2007, une révolution technologique a frappé l'industrie de la téléphonie mobile avec l'annonce par Apple de la sortie du premier iPhone[16]. Puis, en 2008, Apple lance l'App Store et Google, son concurrent, l'Android Market (devenu Google Play Store), créant ainsi une toute nouvelle économie connectée à l'Internet et incorporant de fait les petits acteurs du marché de la téléphonie mobile : les sociétés de développement d'applications[17]. En six ans seulement, un cycle innovant a permis de passer d'un ordinateur portable (PC) compatible avec les services de haut débit à l'iPhone. Aujourd'hui, l'innovation est encore stimulée grâce au développement d'applications diverses et inventives.
III. La situation économique du développeur d'applications avant l'iPhone
La confiance du consommateur dans les développeurs de logiciels avant l'iPhone
Avant l'introduction de l'iPhone, en l'absence d'une image de marque identifiable, les développeurs de logiciels devaient obtenir la confiance des consommateurs eux-mêmes. Cette confiance était la condition préalable à la mise sur le marché des produits développés par les développeurs de logiciels[18]. Or, la plupart des développeurs n'avaient pas d'image de marque suffisante pour commercialiser leur logiciel. Avant l'apparition des plateformes mobiles telles que iOS ou Google Play, les développeurs de logiciels devaient s'appuyer sur des entreprises réputées pour obtenir plus aisément la confiance des consommateurs.
Même les développeurs de "partagiciels", qui pouvaient être distribués numériquement, s'associaient à des marques renommées pour gagner la confiance du consommateur et vendre leurs produits[19]. Par exemple, en 1996, les développeurs du jeu informatique Ultimate Doom ont contracté avec la marque de céréales Chex afin d'augmenter la base de leurs consommateurs. Les créateurs ont transformé ce logiciel pour créer un nouveau jeu, appelé Chex Quest, plus adapté aux enfants et que la compagnie de céréales apposait sur ses boîtes[20]. A présent, ces jeux sont téléchargeables gratuitement sur des plateformes comme Apple iTunes, Google Play ou encore la plateforme indépendante spécifique au jeu, Steam. Les plateformes mobiles permettent non seulement de réduire les coûts mais aussi d'atteindre un nombre de consommateurs bien plus étendu que celui, dans notre exemple, achetant une marque de céréales spécifique, ou plus généralement, achetant un produit au lien de confiance préétabli.
En plus de garantir de manière quasi automatique la confiance d'une large portion de consommateurs, les plateformes mobiles entretiennent et veillent à préserver cette confiance, dont la perte nuit aux plateformes et aux développeurs d'applications qui en dépendent[21]. La confiance immédiate du consommateur dans les marques proposées par les plateformes de renom a une valeur qui va jusqu'à atteindre des milliards d'euros[22] et permet aux développeurs d'éviter la difficulté d'avoir à acquérir la confiance du consommateur.
Les développeurs de logiciels face au piratage avant l'iPhone
Avant l'ère des plateformes, les développeurs de logiciels éprouvaient des difficultés à protéger leur droit de propriété intellectuelle (PI) contre le piratage et le vol. Les sociétés de logiciels ont dû faire face à de sérieux défis pour protéger leurs produits dans les magasins de vente au détail dans la mesure où les codes de licence restaient actifs et faciles à voler. Une fois que les développeurs avaient surmonté les obstacles importants à la mise sur le marché de leurs produits, ils étaient alors confrontés aux menaces de piratage et de vol. Ces menaces réduisaient le nombre de vente et nuisaient aux résultats financiers de l'entreprise. En 2006, la Business Software Alliance a constaté qu'en moyenne, les développeurs de logiciels basés aux Etats-Unis perdaient 6,2 millions d'euros de revenus par an[23].
Avant que les plateformes mobiles ne mettent à disposition des développeurs d'applications des mécanismes de résolution des différends, les développeurs se trouvaient contraints d'engager des poursuites pour violation de leur propriété intellectuelle et de faire face à des procédures judiciaires longues, complexes et coûteuses. Ces procédures pouvaient coûter plusieurs milliers d'euros par mois au détenteur légitime de la propriété intellectuelle et des mois, voire des années de temps qui auraient dû être consacrés au développement de l'entreprise. A présent, les développeurs d'applications et détenteurs légitimes de la propriété intellectuelle bénéficient de solutions rentables fournies par les plateformes pour distribuer et protéger l'intégrité de leurs produits.
IV. L'iPhone et l'avènement du développeur d'applications
Le 29 juin 2007, Apple a mis en vente son premier iPhone[24], permettant ainsi aux applications de jouer un rôle déterminant dans l'évolution des téléphones mobiles. A ce qui était autrefois un appareil pour passer des appels téléphoniques et envoyer des messages texte, les applications ont ouvert un nouveau monde d'innovation et d'opportunités pour les smartphones en offrant la possibilité aux utilisateurs de surveiller leur santé, de gérer leurs finances et une pléthore d'autres activités. La population mondiale est aujourd'hui moindre que le nombre smartphones[25], et un grand nombre de personnes (Au sein de l'Union européenne, parmi les 80% des personnes agées de 16 à 74 ans connectées à internet, 79% utilisent un téléphone mobile ou smartphone [26]) possèdent et dépendent des smartphones.
L'essor des smartphones est inexorablement lié aux applications, en ce que les applications ont créé de la valeur pour les plateformes sur les smartphones.
Aujourd'hui, il est difficile d'imaginer un iPhone sans applications. Or, le premier iPhone ne permettait pas d'héberger des applications externes[27]. Il faut cependant prendre en considération le fait que Steve Jobs, alors à la tête d'Apple, encourageait les développeurs à mettre au point des logiciels pour son navigateur internet Safari[28]. Cependant, cette vision était de courte durée[29]. En octobre 2007, Apple a annoncé qu'il fournirait un kit de développement de logiciels afin que les développeurs tiers puissent télécharger leurs applications sur l'App Store[30]. En juillet 2008, Apple a lancé l'App Store qui a révolutionné l'économie des applications.
L'iPhone a connu des changements et évolutions importantes. Ce sont les applications qui ont servi de moteur à l'évolution de l'iPhone. Cependant, Apple a, dans un premier temps, éprouvé des difficultés à attirer les développeurs d'applications. Ces derniers estimaient que le modèle initial mis à disposition par Apple ne permettait pas de lancer et de développer rapidement[31] leurs applications[32]. Beaucoup de développeurs craignaient que ce processus d'édition de contenu par Apple soit trop restrictif[33], affectant leur capacité d'innovation et le développement de nouvelles versions de leurs applications[34].
En réponse, Apple a travaillé pour mettre fin à ces inquiétudes et rédigé des lignes directrices pour les développeurs ayant participé à l'élaboration d'un dispositif adapté aux modèles d'affaires d'Apple et aux sociétés d'applications - pratique qu'Apple poursuit[35]. L'émergence des plateformes a, de ce fait, eu des effets bénéfiques sur les développeurs de logiciels et a révolutionné le secteur du logiciel et a créé l'économie de l'application mobile. En 2016, la communauté des développeurs d'Apple comptait 13 millions de personnes avec une croissance de 2 millions de développeurs rien qu'en 2015[36]. Le développement d'un réseau de confiance a permis aux développeurs de s'engager directement auprès des consommateurs et des utilisateurs finaux. Il a fourni une base importante pour l'accès au marché, la visibilité pour les consommateurs, la légitimité des produits et la croissance en général. Marc Fischer, propriétaire de l'entreprise Dogtown Media a déclaré que : "Les plateformes sont un moyen de développer, de lancer nos produits numériques et d'atteindre un marché à plus grande échelle (scaling). Nous n'aurions pas d'entreprise sans elles".
Des plateformes performantes ont modifié l'écosystème des applications en offrant aux développeurs d'applications l'accès permanent à un plus grand nombre de consommateurs. Les plateformes fournissent un cadre centralisé permettant aux développeurs d'applications d'obtenir puis de sécuriser leur visibilité auprès des 3,4 milliards d'utilisateurs[37] à travers le monde. Par exemple, l'entreprise d'application éducative française L'Escapadou a sécurisé 1,3 million de téléchargements et a généré plus de 1,28 million d'euros grâce aux ventes d'applications entre 2010 et 2014[38], , un succès qui peut être attribué à la nature centralisée des plateformes. Son fondateur, Pierre Abel, a adapté la langue, le contenu et le prix de chacune de ses applications en fonction des besoins des consommateurs et du marché, et les a commercialisé sur différentes plateformes pour atteindre le plus grand nombre de consommateurs à travers le monde[39].
V. Le développement d'iOS
Depuis son lancement en 2007, l'iPhone a connu plusieurs évolutions. Chaque version de l'appareil a ajouté de nouvelles fonctionnalités au design de l'appareil. Ce qui peut ne pas être évident pour le consommateur est que l'évolution de l'iPhone a été alimentée par l'hébergement d'applications sur la plateforme iOS d'Apple qui a révolutionné l'économie des applications. Cette section se concentre sur l'évolution de l'iOS d'Apple, le logiciel qui pilote l'appareil, et sur la façon dont iOS place les développeurs d'applications comme meneurs de jeu.
Les applications Safari (iOS 1) : Lorsque l'iPhone a été lancé, il était livré avec une boîte à outils permettant de créer des applications. Même si nous ne les considérons plus comme des "applications" telles que nous les connaissons aujourd'hui, elles ont constitué la base de nombreux sites web mobiles encore populaires[40]. Safari mobile a été la première application sur laquelle le web était entièrement visible et ce sont les fonctionnalités du logiciel iOS qui ont permis aux utilisateurs de zoomer tactilement facilement[41].
L'App Store (iOS 2) : Les consommateurs et les développeurs ont sollicité un moyen de tirer profit de la puissance de l'iPhone au-delà des simples applications web. Afin de fournir cet accès et de reconnaître la nécessité d'une protection contre le piratage et les logiciels malveillants, Apple a créé en 2008 un magasin destiné aux consommateurs avec des applications officiellement contrôlées : l'App Store[42]. L'intégration de l'App Store dans iOS 2 a non seulement rendu les applications plus sécurisées, mais a également rendu l'industrie des applications plus viable économiquement, en particulier pour les Petites et Moyennes Entreprises (PME)[43]. iOS 2 et son App Store intégré apportaient un changement fondamental dans la façon dont les logiciels allaient être développés et commercialisés pour toujours. Depuis les début de l'App Store jusqu'en 2017, Apple avait versé aux développeurs d'applications plus de 60 milliards de euros[44].
Copier-coller (Copy-paste) (iOS 3) : Bien qu'aujourd'hui omniprésente sur tous les smartphones, la fonction "copier-coller" ne faisait pas partie de l'iOS d'origine. Apple a non seulement adopté cette fonction dans ses propres applications mais également rendu la fonctionnalité accessible à tous les fabricants d'applications, permettant aux utilisateurs non seulement de copier et coller du texte, mais aussi des graphiques, du son et d'autres médias. En outre, iOS 3 a adopté la fonction de mise au point ("tap to focus") de l'iPhone[45] pour les applications d'appareil photo, que les entreprises d'applications comme Instagram utilisent pour offrir à leurs consommateurs l'option de focalisation de leurs photos[46].
AirPrint (iOS 4) : Aux débuts d'iOS, plusieurs applications utilitaires permettaient d'ouvrir puis d'imprimer un extrait de données ou un document[47]. AirPrint, développé par Apple, a permis aux utilisateurs de connecter facilement leur appareil à une imprimante et aux fabricants d'applications d'imprimer directement à partir de l'application sans avoir à guider les utilisateurs sur la configuration de leur imprimante[48]. En réponse, d'autres développeurs d'applications ont commencé à travailler avec des imprimeurs pour intégrer cette fonctionnalité à d'autres plateformes (p.ex. Google Maps ou Instapaper), ouvrant alors de nouveaux débouchés commerciaux à ces développeurs[49].
Centre de notifications (iOS 5) : Différentes applications ont été créées permettant d'informer l'utilisateur que des évènements importants se produisaient sur l'appareil. Le centre de notification d'iOS 5 a fourni aux utilisateurs une fonctionnalité facile d'utilisation permettant à ces derniers de choisir les applications apparaissant dans le Centre de notifications mais aussi quand et comment être informé d'évènements survenant sur celles-ci[50]. Le Centre de notification d'iOS 5 a facilité la transition vers un nouveau système qui anticipait et acceptait les applications interconnectées avec des notifications multiples (p.ex. les applications associées à un compte Facebook ou Gmail)[51].
MapKit (iOS 6) : Avant iOS 6, Apple utilisait la technologie cartographique de Google (Google Map)[52]. Lorsqu'Apple a commencé à créer sa propre application cartographique, l'entreprise l'a ouverte aux concepteurs d'applications en leur permettant non seulement d'insérer des cartes dans leurs propres applications, mais aussi d'ajouter des annotations et des modes d'interaction personnalisés utilisateur-application (custom user interactions)[53]. Cette application a permis de fournir aux consommateurs des applications GPS plus précises tout en aidant Apple à améliorer son propre logiciel Apple Maps, dans la mesure où iOS 6 fournissait également la mise en antémémoire hors ligne aux applications qui offraient cette nouvelle fonctionnalité[54].
AirDrop et partage (iOS 7) : Apple a créé un cadre simple permettant aux utilisateurs de partager des informations dans des applications et ce, avec d'autres utilisateurs et d'autres applications, rendant ainsi les informations échangées plus compréhensibles, utiles et commodes à gérer[55]. Google a ensuite incorporé un cadre de partage de fichiers similaire à Airdrop d'Apple avec les fichiers Go (Files Go), introduits en 2017, qui permettait aux utilisateurs de déposer des fichiers via Bluetooth[56].
HomeKit (iOS 8) : Les développeurs ont commencé à développer des applications pour les appareils de l'Internet des objets tels que les thermostats, les ampoules, etc[57]. Avant l'iOS 8, les appareils et applications domestiques avaient des difficultés à communiquer entre eux en raison de l'incapacité des systèmes domestiques à être totalement interopérables[58]. HomeKit a résolu ce problème en fournissant un moyen standard pour les fabricants d'appareils et les développeurs d'applications d'échanger des idées et de créer des solutions innovantes[59].
Claviers de tierce partie (iOS 8) : Alors que plusieurs fabricants d'applications avaient proposé des claviers spécifiques[60], Apple a trouvé un moyen sécurisé de rendre cette fonctionnalité disponible pour toutes les applications tout en protégeant les données des utilisateurs[61], et ce, en localisant toutes les données des divers claviers dans une application particulière utilisant cette fonctionnalité.
HealthKit (iOS 9) : Avec le HealthKit, Apple a offert aux utilisateurs un moyen centralisé et sécurisé de stocker et d'échanger leurs données de santé. Compte tenu de l'avènement de la télésanté et de la surveillance à distance des patients, les applications de santé et de bien-être ont aujourd'hui transformé l'iPhone en un appareil d'"assistance".
iMessage (iOS 10) : Les applications telles que WhatsApp et Snapchat ont été les premières à ajouter à l'envoi de simples SMS des autocollants, des applications artistiques, etc[62]. Cette fonction est désormais une application standard sur tous les appareils iPhone.
ARKit (iOS 11) : Bien avant que Pokémon Go ne soit à la mode, Apple avait déjà travaillé en interne sur la réalité augmentée[63]. Après la sortie de Pokémon Go, Apple a présenté ARKit[64] à l'Apple Worldwide Developers Conference (WWDC). Aujourd'hui, de nombreux jeux et applications (par exemple, Ikea Place, Fitness AR, etc) utilisent ARKit de manière innovante et donc profitable pour les utilisateurs finaux[65].
VI. L'évolution des lignes directrices d'Apple pour les développeurs d'applications
En plus du développement de son iOS, Apple s'est également adapté à la demande du marché et a réussi à engager de manière significative les développeurs d'applications. Apple a su faire de son App Store un écosystème hyperconcurrentiel. Cette section explique comment Apple a su développer un cadre neutre pour les développeurs d'applications en utilisant des lignes directrices alimentant ce dispositif pro concurrentiel entre Apple et les développeurs d'applications tiers. La gestion de l'App Store par Apple via ses lignes directrices permet de :
- Maintenir la confiance des consommateurs dans les produits proposés par les développeurs d'applications ;
- Faciliter l'utilisation de la plateforme pour les consommateurs tout en les encourageant à télécharger plus d'applications proposées par les développeurs d'applications ;
- Mettre à disposition des développeurs d'applications un marché concurrentiel et équitable dans lequel ils peuvent rivaliser les uns avec les autres.
Le processus de validation d'Apple avant la parution de ses lignes directrices
De 2008 à 2009, Apple a mis en place un processus de révision interne pour évaluer les applications hébergées sur son App Store. Etant donné le volume d'intérêts des développeurs d'applications souhaitant être sur l'App Store, Apple a identifié la nécessité de mettre en place des procédures répondant aux besoins des développeurs. En l'absence de lignes directrices, le piratage désavantage les développeurs d'applications légitimes dans la prestation de services à leurs clients. Apple a dès lors fourni aux développeurs d'applications une interface d'utilité générale qui protégeait tout en améliorant l'expérience globale des utilisateurs. Ces préoccupations constituent le fondement sur lequel reposent les lignes directrices mises en place par Apple et le constant désir d'Apple d'améliorer sa plateforme a favorisé la croissance exponentielle de l'écosystème des applications.
Comment les lignes directrices d'Apple permettent aux développeurs d'applications de petites et moyennes tailles de concurrencer les géants de la technologie et d'inspirer la confiance des consommateurs dans les produits de nos membres
Le 9 septembre 2010, Apple a publié ses premières lignes directrices du processus de révision de l'App Store à l'attention des développeurs. Ces lignes directrices ont fourni aux développeurs d'applications de petite et moyenne tailles un cadre équilibré qui leur permet de rivaliser avec les géants de la technologie. Par exemple, Apple a rejeté les applications qui profitaient des interfaces de programmation (Application Programming Interface (API))[66] non documentées d'Apple pour s'assurer que les sociétés d'applications, grandes ou petites, fonctionnaient sur un pied d'égalité. Dans ses lignes directrices, Apple a clairement indiqué que l'un de ses principaux objectifs serait le maintien de l'intégrité de l'appareil. Cet équilibre et l'assurance que des logiciels indépendants fonctionnant sur l'appareil ne créeraient pas d'importantes défaillances ont permis d'acquérir la confiance des consommateurs dans les produits proposés et ont, par conséquent, directement profité à la communauté des développeurs. En faisant le lien entre les consommateurs et les développeurs d'applications, Apple a aussi permis d'établir un lien de confiance dans le produit du développeur indépendant.
Lignes directrices sur la lutte contre le piratage
Apple a complété ses lignes directrices à la demande de nombreux développeurs d'applications qui se sont plaints du piratage régulier des applications sur la plateforme. Apple a d'abord réagi en décourageant les applications "copies" ("copycat") sur sa plateforme[67]. Lorsqu'un développeur trouve une copie de son application, Apple lui fournit un moyen de résoudre ce problème. Par exemple, Dan Russell-Pinson, membre de l'App Association, développeur de l'application de géographie Stack the States, attribue sa capacité à confronter et supprimer une application contrefaite à la disponibilité de mécanismes de résolution des litiges sur les plateformes. De son expérience, il écrit : "Passé le choc de découvrir une copie de mon application, j'ai pris le temps de chercher quelles étaient mes options. J'ai pu constater que le processus de règlement des différends relatifs au contenu d'Apple me proposait le meilleur plan d'action pour m'adresser à la société ''copieuse'' et faire supprimer l'application pirate. En cas d'atteinte à vos droits de propriété intellectuelle, Apple fournit une plateforme permettant de soumettre ses réclamations à l'équipe juridique de l'App Store. Votre plainte et vos demandes doivent être exprimées de manière claire. Si vous souhaitez que le contrevenant change le nom de son application, demandez-le spécifiquement. Si vous souhaitez plutôt qu'Apple supprime l'application ''copie'', demandez expressément cette suppression à la fin de chaque correspondance avec l'App Store" [68].
Cette disposition et ce dispositif associé permettent à Apple de traiter la question des applications piratées hébergées sur sa plateforme, lui permettant de supprimer rapidement les applications clones, générant ainsi un bénéfice direct à ses membres.
Modification des lignes directrices sur la protection de la vie privée pour mieux protéger les données personnelles des consommateurs
Avant 2012, les développeurs avaient accès à un identifiant unique et permanent spécifique à l'appareil (UDID) qui pouvait être utilisé pour identifier l'appareil d'un utilisateur. Comme cet identifiant était unique et immuable, certains développeurs et annonceurs ont commencé à l'utiliser pour collecter les informations d'utilisateurs provenant de plusieurs fabricants d'applications, ce qui soulevait des problèmes de protection de la vie privée.
Pour accroître la protection de la vie privée des utilisateurs, Apple a interrompu l'accès à l'UDID dans son iOS 6, le remplaçant par deux nouveaux identifiants : le premier était similaire mais était spécifique à chaque développeur d'applications ; l'autre a été créé pour les annonceurs, et pouvait être réinitialisé à tout moment par l'utilisateur afin d'éviter tout suivi à long terme. Cette approche innovante a permis aux développeurs d'applications de faire fonctionner correctement leur logiciel de cloud pour un appareil particulier, et ce, en améliorant considérablement la protection de la vie privée des utilisateurs.
Changements des lignes directrices concernant le modèle de partage des revenus d'Apple
Apple propose une variété de modèles de partages des revenus dans le cadre de ses lignes directrices. Cette variété a donné aux développeurs d'applications l'autonomie nécessaire pour fixer un prix et une structure de prix adaptés à leur modèle d'affaires. Elle garantit également que les consommateurs obtiennent ce pour quoi ils paient. Environ 90 % des applications mises à disposition sur l'App Store sont répertoriées par les développeurs comme étant gratuites. Ces applications "gratuites" peuvent être financées par des revenus publicitaires, des entreprises dites de "clicks and mortar" ("des clics et du mortier") ou des entreprises qui fournissent un autre service compensé en dehors de la structure interne d'Apple. Pour les développeurs qui choisissent de rendre leur application disponible par paiement direct, trois choix se présentent à eux : (i) achat initial, (ii) achat intégré à l'application, (iii) par abonnement. Apple prélève une partie des revenus des développeurs qui ont décidé de profiter du modèle de paiement direct proposé par Apple. Plus précisément, pour les achats initiaux et ceux intégrés à l'application, Apple prélève des frais de 30%. Depuis 2016, pour les applications qui utilisent le modèle de l'abonnement, Apple prélève 30% la première année, pourcentage abaissé à 15% pour les années suivantes, laissant 85% de profits pour les développeurs d'applications[69]. Les frais d'abonnement d'Apple, que ce soit pour les abonnements initiaux ou les achats intégrés à l'application, réduisent les coûts globaux pour nos membres. Ces coûts globaux réduits incluent la maintenance des enregistrements de collecte de carte de crédit, la validation par des tiers de confiance ou autres mécanismes sécurisés, l'accès au marché mondial et un cadre de confiance pour les consommateurs.
VII. Qu'est-ce que tout cela signifie ?
L'extraordinaire essor de l'économie des applications est allé de concert avec le développement de l'iOS et de l'App Store. Les plateformes établies et centralisées ont contribué à la croissance dynamique de l'écosystème des applications et à son succès inégalé. L'App Store a servi de fondement nécessaire et de base de données pour l'utilisation croissante des applications par les entreprises et industries. L'App Store procure trois avantages pour les développeurs d'applications :
- La réduction des frais généraux systématique et universelle ;
- L'acquisition instantanée de la confiance des consommateurs ;
- L'accès rentable au marché mondial.
Aujourd'hui, toutes les plateformes en ligne, tous les jeux, tous les ordinateurs doivent pouvoir offrir ces fonctions, sans quoi, leur développeur échouerait sur le marché.
Les développeurs d'applications, fournisseurs de contenu et leurs applications sont le moteur du développement et de la popularité d'iOS et de l'App Store. En retour, l'iPhone abaisse les barrières à l'entrée pour les développeurs de logiciels sur les marchés du monde entier. Le succès de ces deux acteurs est symbiotique et ACT-the App Association espère que ce succès se poursuivra ces prochaines années.